Le salaire du péché c'est la mort
Du péché d’impureté aux ours polaires qui hantent les jardins
Le latin a de ses formules laconiques qui servaient bien les prédicateurs en rut de maraudage pendant le carême pour forcer les cotes d’écoute aux confessionnaux. LE SALAIRE DU PÉCHÉ C’EST LA MORT!
Le vrai péché
Il est vrai que le péché est à la racine de l’interprétation du monde que propage le christianisme. Mais pas n’importe lequel péché. Pas ce qu’il est devenu, le péché malaise de l’adolescent qui féconde sa culotte à la vue d’une jolie fille.
Le vrai péché que proclame le christianisme c’est le péché non de luxure mais de RUPTURE. La rupture du rêve d’harmonie évoqué dans l’image du paradis terrestre. On est bien loin des infractions à des règles disciplinaires codifiées par des scribes en recherche de l’ordre absolu c’est-à-dire de la domination absolue.
Le paradis
Le paradis terrestre aux mille formes, vieux rêve que l’humanité concocte toujours dans tous les replis de ses multiples essais, ce n’est pas, dans la perspective chrétienne, le paradis de l’abondance, celle des super-marchés de la consommation post-industrielle, ni le plaisir des 72 vierges d’Allah, mais l’HARMONIE . L’harmonie commandée par l’harmonisation des rapports humains et son rayonnement dans la nature et dans tout l’univers. La paix, la paix des cœurs qui stoppe les guerres, qui féconde et nourrit tout l’univers comme les quatre fleuves qui entouraient le paradis.
Le salaire du péché, c’est la mort
Le péché-rupture a fait éclater le vase clos du paradis rêvé. Et il fera toujours éclater les vases-clos. Et la conséquence du péché, c’est la mort. La mort, le mal, la catastrophe, la non-vie, la rupture du rêve d’harmonie, la chicane, la guerre. Son aboutissement c’est la géhenne. Voilà le message que le christianisme doit porter haut et fort au monde, comme l’a fait Paul VI jadis.
Mais le péché est aussi un départ. Il force un départ. Nos grands parents sont chassés du paradis terrestre non pour y revenir mais pour le repartir dans une nature revêche, limitée par le temps et remplie d’embûches. Le paradis c’est le rêve, le péché, l’alerte, le réveil, la mission.
Le mal dans le monde
La lecture chrétienne du mal dans le monde, de ses morts et de ses défis gravite autour du concept d’une rupture, d’un mal-de-fonctionnement des relations, seules capables d’engendrer l’harmonie rêvée. Le mal ce n’est pas la catastrophe, le tsunami le tremblement de terre, ni même la mort physique d’un enfant au bout de son souffle. Le mal c’est le vide dans ces événements inéluctables, le vide de liens, de soutiens, d’amour.
Le scandale d’un Dieu supposément bon qui permet l’accident ou la mort d’un juste est un non-lieu dans la perspective chrétienne. Dieu n’y est pas un protecteur ni une police d’assurance contre les malaises de notre temps ni contre ses injustices. Il ne sert à rien de le prier pour cela. Il n’y peut rien. Dans le christianisme on a toléré ou encouragé ce genre de prière par faiblesse ou par calcul.
Le Dieu des chrétiens est un amoureux-fou de l’homme. « Gloria Dei, homo vivens » disait Irénée au 3e siècle . Des multitudes de textes répètent sous toutes les formes ces attentions d’un Dieu à créer le tissus social, à le nouer dans les cœurs et non dans la pierre ou les droits, à le réparer, à le remettre à jour sur le métier d’un univers toujours en profondes transformations.
Profanation du message
· Cette vision du mal dans le monde et de son remède est porteuse surtout pour notre siècle si sensible à la communication et si menacé par ces ombres d’incertitudes qui noircissent le ciel de notre futur. Elle est aussi sous-jacente à de multiples actions de concertation et de solidarité tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des murs de l’Église. Pensons aux verts, aux levées de fonds pour toutes sortes de causes humanitaires, aux multiples solidarités permanentes ou occasionnelles qui se créent au fur et à mesure que le tissu social change, aux accords de Kyoto ou autres …aux dîmes que bien des individus même sans foi paient régulièrement à la recherche ou au soulagement des malaises des plus légers aux plus incommodants. Pensons à la réticence viscérale d’une bonne majorité de Québécois à cautionner la guerre, toute guerre aussi bien celles de Bush, de Harper, de Mackensie King et des autres.
Bref le message chrétien n’est pas obsolète pour notre siècle. Il est même très porteur de salut et très porté. Cependant, quand le Vatican fait une mise à jour de ses péchés, on n’entend plus ce message. On n’entend que les vieilles rengaines des péchés découpées en tranches sur la chaîne de montage vers l’enfer. On ne tremble plus devant ces menaces. On les soupçonne même de déviations morbides de l’arc-=en-ciel ou du rayon laser que Vatican II, il y a moins de 50 ans, a fait miroiter à nos yeux. Pourquoi a-t-on fermé les volets? Pourquoi l’Eucharistie chrétienne au lieu d’un corps vivant ne nous sert-elle que des squelettes de Halloween?
On a profané le message. Comme au temps des indulgences on a pratiqué une odieuse simonie avec la Bonne Nouvelle évangélique. On a non seulement mis la lumière sous le boisseau mais on a, comme Judas, le Christ, bassement vendu cette énergie de salut au profit de sa sécurité ou pour la préservation de son pouvoir « ex cathédra ». Ce recel est un crime contre l’humanité.
L’Église peut aujourd’hui demander pardon pour les déviations sexuelles de certains de ses ministres. Mais ce sont là des vétilles bien humaines et bien pardonnables. Le scandale majeur, la pierre d’achoppement qui bloque la route des cheminant humains ce fut d’abord le Pape Pie XII qui s’est tu devant l’holocauste, c’est le silence couvert et à demi-ton devant les guerres en Irak, en Afghanistan et devant les horreurs perpétrés par Israël. Au lieu d’encourager au nom de la foi une opposition systématique à la guerre et à toute guerre on la chloroforme de vieilles rengaines de devoirs de solidarité ou d’aide aux démunis. Mon œil!
Qu’on ne reconnaisse pas droit de cité aux homosexuels parce que leur état de vie ne cadre pas avec les canons fixés à une autre époque, ça c’est scandaleux. C’est une profanation plus grande que celle des temples ou des saintes espèces.
Qu’on dénonce comme péché contre l’humanité la recherche en génétique voilà une contradiction flagrante au message « Allez, dominez la terre, soumettez-la!
Et on pourrait prolonger cette liste à s’attrister les âmes.
Au lieu de le faire, notre ami Jacques et son mentor Mario Roy de La Presse ridiculisent les timorées insertions du Vatican et de Mgr Gianfranco Giroti dans la lutte aux monstres de notre époque avec le fer de lance d’un péché rouillé. Ils ont bien raison. Mieux vaut en rire qu’en pleurer!
Mais dans l’élan de cette évacuation Jacques et Mario balancent le bébé avec l’eau du bain. A lire leurs tapes, toutes les religions seraient ineptes et inaptes à apporter quelqu’efficace énergie dans la résolution des maux de notre temps. Et le paradis dont ils (ces messieurs que je respecte plus que moi-même) s’auréolent le caput, c’est la baisse de la pauvreté-misère, progrès qu’ils créditent à la sainte mondialisation.
Pourtant, il y aura toujours des pauvres parmi nous disait un certain Jésus « and the show must go on »… car les ours polaires hantent nos jardins!
C’est comme si après deux mille ans de christianisme on n’a pas compris le mal de notre monde. On n’a pas compris que le mal ce n’est pas le réchauffement de la planète avec ses effets de cataclysme anticipés mais bien la confusion tout azimut des humains, leur tour de Babel qui les rend incapables de mettre à l’eau une petite arche de salut.
Toute la puissance et tout le génie accumulés de l’homme le rendent fort en balistique pour porter la destruction loin de ses frontières mais tout à fait éberlué, tatillon à la Dion et constipé devant toute initiative de concertation et de paix.
Les entrepôts d’ogives nucléaires sont mieux garnis que les réserves alimentaires mondiales. Les budgets et les salaires de guerre dépassent honteusement la part de 1% du PIB non encore atteinte, à consacrer au tiers-monde.
Il est là le péché du monde, notre péché du siècle.
Et quand nos Messieurs Jacques et Mario projettent l’image des ours polaires qui hantent nos jardins, ils tombent dans le même piège qu’ils dénoncent, celui de la menace qui fait peur et soumet ou du ridicule qui paralyse.
Pourtant, dans les archives du Vatican comme dans toutes les sacristies de notre monde, de puissants électrogènes capables d’éclairer le mal du siècle et d’y remédier, sont débranchés. Au lieu de les brancher, le Vatican préfère dépoussiérer ses péchés et La Presse caricaturer le mal en ours polaire.
Pourtant, « noli timere » j’ai vaincu le monde, disait-Il, il y a deux mille ans.